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RécitMohammed Zaanoun est un photographe gazaoui de 37 ans. Pour « Le Monde », il a fait les portraits d’habitants qui, comme lui, ont dû abandonner leur maison sous les bombes israéliennes.
Depuis deux semaines, tous les jours, Mohammed Zaanoun prend sa voiture et file, d’immeubles éventrés en ruines encore fumantes, photographier la dévastation de l’enclave de Gaza sous les bombes israéliennes.
« Partout sur la route, je suis témoin des bombardements, constamment on entend des explosions, je vois les missiles frapper. Où que tu regardes, tu vois des immeubles détruits. Dans les rues flotte l’odeur des dépouilles des martyrs, de la poudre, de l’incendie et de la mort. Il y a plus de mille corps coincés sous les décombres parce que les secouristes ne sont pas assez nombreux face à l’ampleur des bombardements. Eux, les équipes médicales, mes amis journalistes… Tous sont des cibles, beaucoup ont été tués », raconte au téléphone le photographe gazaoui, affable malgré les nuits sans sommeil, la peur constante et le chagrin.
Certaines scènes dont il a été le témoin ne s’effaceront probablement jamais de sa mémoire, comme cette fillette qui appelait sa famille, coincée sous les décombres de sa maison, dans le quartier de Zeitoun, dans la ville de Gaza.
Les chiffres, à la froideur comptable, ne disent rien de l’ampleur du drame. En deux semaines, selon le ministère de la santé de Gaza, dirigé par le Hamas, plus de 4 100 personnes, majoritairement des civils, ont été tuées dans les bombardements menés par l’armée israélienne, et plus de 13 100 autres ont été blessées.
Tsahal bombarde en continu. Israël affiche sa volonté de détruire le Hamas, le mouvement qui dirige l’enclave, après l’attaque sanglante qu’il a menée dans l’Etat hébreu le 7 octobre, tuant 1 400 personnes et ramenant plus de 200 otages à Gaza. L’offensive israélienne est assortie d’un état de siège : plus rien n’entre ni ne sort de l’enclave depuis quinze jours. Gaza était pourtant déjà affaiblie par seize ans de blocus. Plus d’un million de Gazaouis ont été déplacés par les bombardements ; Mohammed est l’un d’eux.
Sa maison, en lisière nord de la ville de Gaza, non loin du front de mer, a été détruite. Son fils a été légèrement blessé dans un bombardement. Il a déménagé sa famille chez ses beaux-parents, dans le quartier Al-Rimal, en partie détruit la semaine dernière, puis chez sa sœur. Ils sont aujourd’hui réfugiés dans le sud, à Rafah, chez un proche de sa femme. Lorsqu’ils sont arrivés, « la maison était en deuil » : leur hôte venait de perdre une partie de sa famille dans un bombardement.
Mohammed cache à ses quatre enfants que leur foyer n’est plus qu’un tas de gravats : « Je dis à ma fille que j’irai chercher son vélo plus tard, que je n’ai pas le temps. Je lui dis qu’on retrouvera notre maison bientôt. » Pendant deux jours, mercredi 18 et jeudi 19 octobre, il a suivi des déplacés, comme lui, ballottés entre deux abris, entre deux bombardements. Il raconte au Monde ce que lui ont dit les personnes qu’il a photographiées.
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Author: Sara Nicholson
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